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Assumer mon handicap
Camille, 17 ans

Camille (1) a 17 ans ; elle vit avec un lourd handicap depuis sa naissance. Elle a lu le témoignage sur le « site des adultes » d’Alain Rohand qui a aujourd’hui la soixantaine et vit, depuis l’âge de 11 ans, avec de fortes séquelles d’une poliomyélite. Camille nous fait part à son tour de sa propre expérience.

Pour lire l’article d’Alain Rohand, cliquer sur le lien suivant :
« Vivre handicapé… Une chance ? »

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Je suis handicapée. Je marche mal, mes gestes partent dans tous les sens, mon élocution laisse à désirer… Oui, et pourtant… Ce handicap fait partie de moi. Je suis née avec, je me suis construite avec, je vis avec. Ni contre, ni sur, juste avec. J’aurais pu, c’est sûr, grandir contre lui, en refusant de l’accepter… mais je me serais rejetée moi-même. J’aurais aussi pu, comme d’autres, me forger sur lui, en faire mon unique combat. Mais je trouve ça triste, tellement triste… Je préfère essayer de ne pas limiter ma vie à mon handicap. Etre consciente de lui, mais le dépasser, ne pas le laisser m’engloutir.

Evidemment, tout n’est pas simple. Etant handicapée, j’ai dû apprendre à me battre dès toute petite. Me battre contre mon corps, bien sûr, essayer de lui résister quand il me met des entraves. Apprendre les choses élémentaires : mettre les mains en avant quand je tombe, penser à avaler sa salive,… rien n’était acquis d’avance, et pourtant j’y suis arrivée. Aujourd’hui les défis sont autres : il s’agit par exemple de dépasser la peur d’être bousculée dans une rue pleine de monde, de me lancer debout face à l’inconnu. Je sais que demain d’autres challenges physiques se présenteront, et qu’il faudra à nouveau les relever.

Mais les challenges ne sont pas que physiques. Il faut aussi réussir à se tailler sa place, à assumer le regard des autres. Parfois ce regard fait mal, il y a un mot qui brûle, une phrase qui blesse. Mais je l’accepte, cela fait partie des règles du jeu. Ce regard – qu’il soit de pitié, de mépris ou de simple curiosité – je le trouve compréhensible, et même nécessaire. Il est normal que les gens aient cette attitude s’ils n’ont jamais été confrontés au handicap. Après, c’est à moi, c’est à nous de faire évoluer les choses. Les gens voient avant tout l’image qu’on leur envoie. Si l’on veut qu’ils dépassent le handicap, il faut d’abord soi-même l’avoir dépassé. Ne pas se replier sur soi en pleurnichant. La barrière, c’est aussi nous, handicapés, qui la mettons. Bien sûr, ce n’est que mon avis et je sais que de nombreuses personnes handicapées pensent différemment. Mais pour moi, c’est essentiel.

Sans tabous, sans limites, dépasser le handicap. Aller au-delà. Oui, je suis handicapée. Oui, j’ai parfois des moments de découragement… Qui n’en a pas ? Mon handicap, je n’y pense pas chaque seconde, chaque minute, tout comme on ne pense pas à chaque instant que l’on est brun, blond ou roux. Il ne m’empêche pas d’avoir un caractère, un sale caractère même. Il ne m’empêche pas d’exister aussi fort que n’importe qui. Et de le clamer.

Camille
Peinture de Marc Chagall

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